Expédition à Karkhorine

Entre notre souhait de découvrir l’arrière pays mongole et notre résolution de rejoindre rapidement la Chine, il nous a semblé que Karkhorine serait un bon compromis. A seulement 6 heures de bus, cette ancienne capitale, cité isolée, nous promet de belles découvertes.

En arrivant à Karkhorine, on imagine difficilement qu’elle put, au XIIIème siècle, être une capitale prospère: coeur administratif, culturel et commercial de la Mongolie, selon la volonté de plusieurs générations de grands Khaan. Au fil des siècles, la cité, construite dans l’enceinte de murailles de 4000 mètres de côté, véritable patchwork d’influences orientales et occidentales, se vit enrichir de temples et autres bâtiments nobles et religieux. Entre 1872 et 1930, les soviétiques ont tout rasé. Il ne reste aujourd’hui plus qu’une partie du monastère d’Erdène Züü, premier culte bouddhiste construit au XVIème siècle, et trois des quatre statues tortues postées aux quatre coins de la ville.

1 – De la fumée sans feu

Avertis de la difficulté à trouver un lieu d’hébergement dans le « village » à cette période de l’année, nous suivons un mongole, venu nous accueillir à la gare routière, jusqu’à sa guesthouse. Nous découvrirons en deux jours, un homme certes sympatique mais peu professionnel et bien plus porté par l’argent que par un désir quelconque de renseigner, conseiller ou satisfaire son client. Nous en faisons les frais dès la première nuit. Malgré les six couvertures qui nous recouvrent, seuls dans notre yourte, nous réalisons au beau milieu de la nuit que notre hôte a laissé notre feu s’éteindre. Nous parvenons tant bien que mal à supporter les dernières heures qui nous séparent du matin. Vers 8h, notre hôte arrive, et serviable, emplit la yourte de fumée en tentant de rallumer notre poêle. Nos habits sont gelés, nous expirons de la fumée, il fait près de -5°C dans la yourte. Se hisser hors de notre lit pour enfiler nos vêtements, voilà une épreuve éreintante pour commencer la journée. « C’est ça l’aventure » lance Mr Routenvrac, réussissant ainsi à rattraper nos sourires en plein vol. Réchauffés, restaurés, nous nous équipons et partons à la découverte de Karkhorine.

2 – Visite culturelle

Après une demi-heure de marche, quelques troupeaux de vaches et de chèvres à la sortie de la ville et nous pénétrons dans le monastère d’Erdène Züü. Nous y rencontrons un calme paisible, des temples, des ruines, quelques mongoles venus se recueillir. Dans un temple, des moines, dont certains à peine âgés de 12 ans, nous observent passer, poursuivant leurs occupations quotidiennes entre prières et bols de soupe.

En quittant le monastère, nous le contournons et marchons près de 500 mètres, le long des murailles, dans une neige épaisse pour découvrir une statue tortue.

En revenant sur nos pas, nous retombons sur l’unique route de Karkhorine et poursuivons notre chemin en direction du nouveau musée. Celui-ci nous impressionne. Bâtiment exceptionellement moderne, il a ouvert ses portes en 2010. Nous sommes surpris par le décallage. Le musée est désert. Une guide privée nous accueille et nous commente chaque espace. Seuls dans le musée, les lumières s’allument à notre arrivée et s’éteindront à notre départ. Nous découvrons des oeuvres antiques, une histoire assez complète et une reconstitution miniature superbe de la cité au XIIIème siècle.

Nous avons à présent plusieurs heures devant nous et partons, au grand air, escalader les montagnes pour voir la cité d’en haut. Nous prenons conscience de l’étendue de la ville, des différents quartiers et tentons d’imaginer ce qu’elle a pu être des siècles auparavant.

3 – Jeep deluxe

Le lendemain, nous avons négocié avec notre hôte, une excursion en jeep vers le semi-désert. Avare en détours autant qu’en commentaires, en trois heures il nous conduit sur notre point d’arrivée: une famille nomade auprès de laquelle nous passerons la nuit. Sur le trajet, nous croisons une caravane de chameaux. Nous serions bien montés dessus pour pimenter un peu la ballade mais notre « guide » nous garantit qu’il nous faudrait courir vite.

Nous profitons de ce dépaysement pour nous promener tous les deux dans ce désert, que seules peuplent quelques familles nomades. En fin de journée, au chaud, dans la yourte, nous observons nos hôtes: la grand-mère filant la laine, la femme cuisinant.

Lorsque, la nuit tombée, l’homme apparaît près de la yourte, sur son cheval, Mr Routenvrac se presse de sortir pour profiter au maximum de sa présence. Il aide le vieil homme dans la collecte de bouses qui servira à alimenter le feu, puis les accompagne, lui et sa femme, lors de la traite des vaches, détachant, au moment venu, les veaux qui se ruent avec hargne vers le pi de leurs mères.

La yourte est bien différente de celle que nous connaissons; plus riche, traditionnelle mais également moins vivante. Les repas sont délicieux. Une fois encore, nous constatons non pas la diversité mais la qualité culinaire mongole.

Le lendemain, après un passe-passe financier de la part de notre « guide », nous le quittons sans état d’âme, sur la route d’Oulan Bator. Nous profitons une dernière fois des paysages au travers des carreaux du bus, recouverts en quelques instants par une épaisse couche de glace.

Ce soir, et pour trois nuits encore, nous dormirons dans la chaleur de la yourte familiale que nous apprécions tant. Ensuite, il nous faudra reprendre la route, en direction du pays du soleil levant. L’heure sera bientôt aux « au-revoir ».

L’album photo complet ici

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